« Dormez, enveloppés dans l’orgueil de la
gloire, Et lorsque nos enfants, évoquant la mémoire
Plus tard demanderont :
Pourquoi tant exalter Tous ces noms ciselés dans le
marbre et le cuivre ? Nous dirons : Ils sont mort pour que nous
puissions vivre Ils ont versé leur sang pour notre
liberté ! »
Ces vers, déclamés par leur auteur, Pierre
Valdelièvre, lors de l’inauguration du monument aux
morts de Mons-en-Barœul, le dimanche 3 août 1924,
reflètent les sentiments de l’époque.
L’armistice du 11 novembre 1918 a mis fin à la Grande
Guerre mais son souvenir et surtout celui des quelque 150 victimes
de notre commune tourmentent encore bien des Monsois.
Un comité local, sous la présidence
d’honneur du maire, Gustave Roussiez, déjà bien
malade, et dirigé par Jules Tiers et Gustave Decoster, a
lancé une collecte pour l’érection du monument.
L’emplacement choisi, à l’angle des rues Rollin
et Daubresse-Mauviez (aujourd’hui du Général de
Gaulle) est excellent. Mais il faut reloger les locataires de
l’ancienne caserne des douanes puis la détruire, ce
qui ne va pas sans difficultés.
La construction de l’ouvrage est confiée à
l’architecte Chrétien-Lalanne et au sculpteur
Dominique Bevilacqua. L’espace libéré
reçoit le nom de « place du Combattant ». Le 7
août 1923, la statue arrive en gare de Lille mais elle est
brisée au pied. Un an plus tard, ouf ! Tout va bien, le
poilu restauré est impeccable.
Une « belle fête »
C’est ainsi que les gazettes de l’époque
qualifient l’inauguration solennelle du monument. Celle-ci
comportera, « comme il convient, une partie religieuse et une
partie civile », note le Bulletin paroissial
d’août 1924. Pour la grand-messe en
l’église Saint-Pierre, on reconstitue, dans
l’allée centrale, la tombe du « poilu »,
veillée par quatre enfants « vêtus, le premier
en zouave, le second en aviateur, le troisième en fantassin,
le quatrième en artilleur ».
L’après-midi, « toute la petite place, les
rues avoisinantes, la rue Daubresse-Mauviez sont noires de monde.
De véritables grappes humaines sont accrochées aux
grilles des jardinets précédant les habitations
», raconte le Grand Hebdomadaire illustré. Dans
« un religieux silence », MM. Casier et Delerue, deux
mutilés, dévoilent enfin le soldat symbolisant les
Monsois « tombés au Champ d’honneur.
»
"Soyez bénis, pauvres enfants martyrs de
Mons-en-Barœul, qui avez donné notre jeunesse afin que
dans l’avenir on cesse de tuer et de haïr »,
proclame Jules Tiers dans son discours. Malheureusement
l’Histoire le désavouera. Les bons sentiments ne
suffisent pas à faire taire les armes.
La réfection de la rue du Général de
Gaulle poussera plus tard le maire Félix Peltier à
rénover le square du Combattant. Le monument reculera de dix
mètres environ par rapport à son ancien emplacement
qui se trouvait au niveau de l’actuelle étoile en
mosaïque. Les noms des victimes sont moins visibles puisque
notre « poilu » est nettement plus en retrait du
cheminement spontané des piétons, et il faut, pour
lire, vouloir vraiment se rappeler… Certains passants
pensent que le monument ne comporte aucun nom. Cette erreur vaut
bien celle du Grand Hebdomadaire qui, en relatant la
cérémonie, situait notre monument sur « la
place de l’église ».
Le « Poilu » prend son premier bain de foule. Il
sera dorénavant le lieu de rendez-vous de toutes les
manifestations patriotiques monsoises.
Sur l’estrade dressée face au monument, on
reconnaît le premier adjoint Émile De Goedt, faisant
fonction de maire. Merci à Mlle Germaine Tellier,
petite-fille de Jules Tiers, qui nous a confié le journal
dont les photos sont reproduites ici.