39-45 : vaille que vaille, malgré l'occupation, la vie
continue... et la vie pour les enfants passe par
l'école...l'école des filles d'un côté
et l'école des garçons de l'autre. La mixité
n'est pas encore de mise.
Au centre du Mons d'alors, les écoles officielles Rollin
(garçons) et Mme de Sévigné (filles),
écoles publiques et écoles privées : Saint
Honoré (garçons) et Notre Dame de la Treille (filles)
encerclent l'église Saint-Pierre. Les écoles Notre
Dame de la Treille et Rollin seront démolies en 1984 pour
faire place à la salle de sports et au restaurant scolaire
Léo Lagrange. Sur les emplacements de l'école Saint
Honoré et du cinéma de quartier situé
derrière l'église (reconverti en Cercle Monsois dans
les années cinquante) sera édifié un nouveau
groupe scolaire privé en 1984.
L'entrée de l'école ND de la Treille dans les
années 40 ; à coté de la porte a
été érigée la stèle Marcel
Pinchon
Photo de classe à St Honoré, la cloche a
été récupérée et
réinstallée... elle sonne encore les
récrés et l'heure de la sortie !
Les registres d'appel journalier de l'école Saint
Honoré de ces années ont miraculeusement
survécu au temps, aux déménagements et...
à un pillage de l'école en mai 40.
Ils révèlent, comme ceux d'aujourd'hui, ici une
épidémie de varicelle (mai-juin 42), là un
hiver extrêmement rigoureux (janvier-février 45) : un
tiers des enfants souffrent de rhumes ou de grippe, un autre tiers
est bloqué à la maison par un temps qu'on imagine
épouvantable. S'égrènent au long des pages les
absences, les mots d'excuses, les suppliques attentionnées
:
"A. a mal au ventre, s'il doit aller au cabinet ayez la
bonté de le laisser sortir", les demandes polies "J. devant
s'abstenir demain matin, auriez-vous la bonté de lui faire
prendre devoir et leçons", les coups de colère:
"très étonné de l'absence de notre fils en
classe, afin de l'apprendre, vous pouvez le punir". Tout cela, a
à peine changé mais l'école n'est pas tout
à fait à l'abri des vicissitudes de ces temps
troublés. Le directeur, M. Quiquempois est rappelé en
mai 40 vers le centre de la France, il reviendra quelques mois plus
tard. Et puis très vite, c'est l'invasion des troupes
allemandes ; l'évacuation, des familles entières
jetées sur les routes arrachant des élèves
à leur école. Certains ne la retrouveront qu'en 43
revenant de Castres ou de Clermont-Ferrand ou d'ailleurs. De
nombreux pères de famille sont faits prisonniers, les mamans
se retrouvent seules, et ont évidemment besoin de leurs
"grands". Au bout d'une ligne, marquée de nombreuses croix
d'absence, on lit : "aide maman aux champs, père prisonnier"
et plus ponctuellement, ici et là :"courses, aide maman",
"aide à la ferme", "mère malade"... Parfois une
tragédie réduite à quelques mots : "papa
décédé à la guerre', "papa
décédé suite maladie contractée au
stalag". Et de moments qu'on devine plus heureux: "retour du
père".
On voit poindre les difficultés du quotidien : se
chauffer : "M. n'est pas venu à l'école, il a
été au coke", "veuillez excuser C. s'il a
manqué hier, n'ayant plus de charbon, j'ai été
chercher du bois avec lui, manger: "excusez encore une fois je
l'avais envoyé chercher les cartes de ravitaillement, il est
rentré trop tard". La guerre ne fait qu'aggraver les
situations peut-être déjà précaires :"M.
n'est pas venu en classe ayant ses chaussures en
réparation".
Les combats se rapprochent, des sites proches sont
bombardés : "Y n'a pu se présenter en classe, il a
été aider sa tante qui est sinistrée de
Fives". En mai 44, on prend peur au point de transférer
l'école dans les dépendances de la ferme au
début de la rue du Barœul. Les locaux avaient
été blanchis à la hâte... Les filles de
Notre dame de la Treille, les fréquentaient le matin, les
garçons de Saint Honoré l'après-midi... Dans
la précipitation, certains élèves ne sont pas
prévenus d'où de nombreuses absences. Et la guerre
prend fin, la ville est libérée en septembre 44, nul
doute qu'il y eut de l'ambiance à la première foire
aux plaisirs de l'après-guerre. D'une fine écriture
à la plume, les noms et adresses continuent à
s'aligner sur les registres.