En guise de vœux en ce début d'année 2003,
l’Association historique a voulu vous offrir ces anecdotes
authentiques et savoureuses, relatées par Mme Denise Polez
pour illustrer son enfance monsoise. Nous la remercions du long
entretien accordé à notre équipe
audiovisuelle. Dans un registre tout différent, le livre
« Mons-en-Barœul, du village à la ville »
a rappelé le souvenir de son père, le
résistant Henri Poissonnier, mort déporté en
1945, et dont une rue de notre commune porte le nom.
Née rue Pasteur le premier jour du printemps, il y a
bientôt quatre-vingts ans, Denise raconte avec truculence ses
souvenirs d’enfance dans le Vieux Mons, employant volontiers
le patois que beaucoup de nos compatriotes parlaient autour
d’elle.
« Faut pas t’en faire ! Samedi, j’viens
mettre tes gosses à l’cuvelle », disait une
voisine dévouée à sa mère malade et
hospitalisée. Une autre faisait la lessive, une autre la
cuisine… « Les gens étaient serviables.
C’était le bon temps », répète
Denise.
Les chants des coqs dans les fermes environnantes rythmaient la
vie quotidienne et on ne se formalisait pas de leur concert
matinal. Parfois l’un d’entre eux oubliait
l’heure.
« Alors, Émile, t’as pas bien remonté
l’réveil ! » dit un jour un voisin au
propriétaire des coqs de combat.
Le parc à coqs se situait au café de la Goulette,
à l’entrée de la rue Faidherbe, près de
la chapelle Sainte-Thérèse qui existe toujours. Quand
on demande à Denise si elle assistait aux combats de coqs,
elle répond : « Non, je me sauvais ». Mais ces
réveils à plumes ont mis des couleurs vives à
la mémoire de son enfance.
La fanfare en goguette
Son grand-père Alfred jouait de la basse à
l’Harmonie de Mons. Il avait un ami, Alexandre, joyeux drille
à ses heures, qui en était le porte-drapeau. La
fanfare faisait habituellement un voyage à Ostende à
l’occasion du lundi de la Braderie. « Tu paries pour un
d’mi ? J’vais me mettre à danser en
caleçon sur la place. Allez ! » dit Alexandre, que
tout le monde appelait « l’cousin ».
Alors toute l’équipe des guignolos, raconte
Denise, a fait la ronde. Ils ont joué de la musique sur la
place d’Ostende. Et puis l’cousin s’est mis
à gamberger et puis à danser en caleçon. Alors
il a été arrêté par la police et conduit
au poste, si bien que toute l’Harmonie est partie en fanfare
pour libérer l’cousin. Quand il est rentré, il
a dit à sa femme : « Tu sais, y en a qui vont dire que
j’ai été en prison. Mais tu les crois pas, hein
! C’est des minteux ! »
La femme du cousin tenait un commerce. Le lendemain, une de ses
premières clientes s’écria, sitôt dans le
magasin : « Eh ben alors ! Qu’est-ce que vous en dites
que l’cousin y’a été en prison ?
- Ah vous, ça va ! Vous sortez ! On m’a
raconté l’histoire et c’est pas vrai ! »
répondit l’épouse confiante. Elle n’a
jamais voulu croire que son mari était allé en
prison.
Un g’va" pas si bête que ça
Les petits métiers animaient la rue Daubresse-Mauviez
(du Général-de-Gaulle) et on entendait souvent
« Parapluie ! Parapluie ! » rue Pasteur ou rue Nouvelle
(Victor-Lelièvre). C’était le cri du vendeur
qui frappait aux portes pour proposer ses parapluies ou
réparer les précieuses baleines.
Le marchand de charbon livrait les boulets dans une charrette
tirée par un cheval gourmand. Chaque fois qu’il
passait devant la boulangerie du Trocadéro, l’animal
s’arrêtait.
« L’bourrin à Dupuis, il lui faut
s’faluche tous les jours. Y veut pas r’démarrer
tant qu’il l’a pas eue ».
Et la boulangère, bonne pâte, lui donnait sa
faluche, cuite spécialement à son intention.
« C’était l’bon temps, le temps
où c’était d’mon temps », a-t-on
envie de dire souvent en évoquant le temps de sa
jeunesse.
La Fanfare de Mons-en-Barœul a fêté son
cinquantième anniversaire en 1925. Les musiciens portaient
alors l’uniforme. Le nom d’Harmonie a été
adopté en 1935 (Repr. « Grand Hebdomadaire
illustré »).